Les Ménines – Diego Vélasquez

Initialement intitulée « Tableau de famille de Philippe IV », la toile, peinte en 1656, met en scène la petite Marguerite, infante d’Espagne, alors âgée de 5 ans et héritière du trône depuis que sa demi-soeur Marie-Thérèse est promise à Louis XIV. 

La jeune princesse est entourée de deux « meninas », demoiselles d’honneur des infantes, qui, au XIXe siècle, donnèrent leur nom au tableau.

A la gauche de l’Infante, un nain et une naine ont pour rôle de divertir l’enfant tout autant que de mettre en valeur sa perfection physique.

Car ce tableau de la royale fillette a pour but, comme souvent à l’époque, de témoigner auprès de toutes les Cours d’Europe de la beauté de Marguerite et d’attiser l’intérêt des prétendants. 

Malgré sa jeunesse, tout en elle exprime sa royale destinée : la magnifique robe à vertugadin, le gros chien couché à ses pieds, qui symbolise le pouvoir et l’autorité de l’enfant, et la présence, dans le miroir, de ses parents, le Roi et la Reine d’Espagne, gages rassurants de sa prestigieuse ascendance.

Oui mais voilà l’année suivante, en 1657, vient au roi Philippe IV un garçon, un héritier mâle donc, qui détrône la jeune Marguerite dans l’ordre de la  succession. Vélasquez modifie alors le tableau. Il se représente à gauche du tableau, dans l’un des deux seuls autoportraits qui nous est parvenu du peintre. Une radiographie du tableau révèle en effet qu’à l’origine se trouvait à sa place un page qui tendait à l’Infante un bâton de commandement. 

L’artiste, devant une toile, pinceau levé, observe devant lui. Mais que peint-il ? Quel sujet se tient en face de lui ? Le couple royal qui se reflète dans le miroir ? Le spectateur, dont le reflet se mue avantageusement en roi et en reine ? A moins que, par un complexe jeu de miroirs disposés par Vélasquez, il ne peigne la scène que nous avons sous les yeux. Certains critiques ont en effet montré que l’escalier qu’on voit par la porte au fond du tableau ainsi que la source de lumière émanant probablement d’une fenêtre étaient inversés par rapport à la configuration du palais royal.

Ce couple dans un miroir ne vous rappelle-t-il pas un autre tableau dont je vous ai révélé les secrets il y a peu ? Oui, « Les époux Arnolfini » de Van Eyck ! Rien d’étonnant : à l’époque le tableau est accroché dans le palais de Philippe IV.

Mais les effets de mise en abyme ne s’arrêtent pas là ! Sur le tableau de Vélasquez figurent d’autres tableaux : des copies d’épisodes des « Métamorphoses » d’Ovide de Rubens et Jacob Jordaens réalisées par…le gendre de Vélasquez, Juan del Mazo.

Il faut dire que Vélasquez, en plus d’avoir été le peintre du roi pendant plus de 30 ans, était aussi en charge des collections royales du grand mécène que fut Philippe IV.

On suppose que la croix rouge de l’ordre de Santiago que porte le peintre sur le tableau et qu’il ne reçut qu’en 1659 fut ajoutée après sa mort à la demande du roi.

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