Ce tableau peint en 1735 met à l’honneur un mets raffiné et fort apprécié au XVIIIe siècle : les huîtres.
On pourrait s’étonner que ce mets qui a la réputation d’être aphrodisiaque ne se déguste sur cette toile qu’entre hommes. Mais il s’agit d’une scène de retour de chasse, commandée par le jeune Louis XV. L’élégance des costumes semble contredire cette lecture pourtant d’autres tableaux de l’époque montrent des personnages (dont Louis XV lui-même) en bas, longues vestes colorées et chemises à jabot, exhibant le produit de leur chasse.
Les coquilles d’huîtres qui jonchent le sol, comme jetées avec désinvolture, peuvent toutefois évoquer une certaine luxure. A la fin du siècle, Casanova, dans ses mémoires, confère même à cet aliment une puissante charge érotique avec « le baiser de l’huître » qui consiste à se faire passer la chair de l’huître de bouche en bouche.
Ce tableau donne à voir, pour la première fois en peinture, un autre plaisir de la bouche : le champagne ! Inventé quelques années auparavant, on le reconnaît ici à la forme trapue des bouteilles.
Et regardez à gauche du tableau, ces hommes derrière la table au regard levé vers le plafond : ils suivent des yeux le bouchon de champagne qui vient de jaillir de la bouteille !
Ce tableau constitue un précieux témoignage des arts de la table au temps de Louis XV: on y voit des plats et des couverts en argent massif, des petits bols en porcelaine, les rafraichissoirs, pour poser et rafraîchir les verres. En effet, il est interdit à l’époque de poser les verres et les bouteilles à même la table. Au premier plan, devant la table, on remarque aussi un grand rafraichissoir à bouteille dont les bacs sont remplis de glaçons, l’ancêtre de notre seau à champagne…
Actuellement conservé au château de Chantilly, le tableau fait pendant au « Déjeuner de jambon » de Nicolas Lancret.