Le XIXe siècle connaît un véritable engouement pour l’Orient. Les Orientalistes flattent le goût du public en lui offrant des visions d’un Orient fantasmé et souvent sensuel, mettant en scène par exemple des femmes lascives dans des bains ou des harems. Certains, comme Ingres, n’ont jamais mis les pieds en Orient…
Ce n’est pas le cas d’Étienne Dinet qui découvre l’Algérie à l’âge de 23 ans où il s’installe même en 1904, dans l’oasis de Bou-Saâda, que l’on surnomme » La porte du désert » ou « La cité du bonheur ».
Et en effet, c’est bien le bonheur qui irradie des sourires des enfants qu’il représente ici. En contre-plongée, ils nous observent malicieusement du haut d’une terrasse. Leurs vêtements colorés, leurs bijoux en argent, les motifs au henné qui ornent leurs visages suggèrent que c’est un jour de fête.
Ils semblent pris sur le vif, dans la spontanéité et le relâchement de leurs postures d’enfants : jambe pendante sur le mur, visage qui se repose négligemment sur les mains. Seule la jeune fille en arrière-plan semble quitter l’enfance, dissimulant pudiquement son sourire sous son voile.
L’artiste fait ici presque un travail d’ethnographe, lui qui dans ses tableaux s’attache à représenter tous les âges de la vie dans la simplification de situations quotidiennes.
La terrasse est un lieu qui revient souvent dans la peinture de Dinet. Entre l’intérieur et l’extérieur (elle appartient à la maison mais on y est dehors ), entre la terre et le ciel ( les pierres jaunes du mur contrastent ici avec le bleu du ciel), la terrasse symbolise tout autant le lien que la transition.
En 1913, le peintre se convertit à l’islam sous le nom de Nasreddine et n’a de cesse de faire le lien entre la France et l’Algérie, se battant notamment pendant la Première Guerre mondiale pour que les blessés algériens soient rapatriés ou pour que les Algériens tombés pour la France puissent recevoir une sépulture musulmane. Il dessinera d’ailleurs les motifs de ces sépultures pour remplacer les croix.