La montagne Sainte-Victoire, située à l’est d’Aix-en-Provence, a inspiré 87 toiles à Cézanne, 44 huiles et 43 aquarelles. Au fur et à mesure des tableaux, la composition évolue, la technique aussi. D’abord simple décor en arrière-plan, la montagne devient centrale. Les éléments peints perdent peu à peu de leur réalisme, se dissolvent dans des formes géométriques qui confinent au cubisme et préfigurent même l’abstraction.
C’est au pied de cette montagne que grandit le petit Paul. Enfant déjà, il escalade ses 1011 mètres de calcaire en compagnie de son ami, un certain Émile…Zola. Si l’amitié entre le peintre et l’écrivain perdure à l’âge adulte, elle sera entachée par un roman de Zola, » L’oeuvre ». Le héros Claude Lantier est un peintre, inspiré de Cézanne. Il échoue à imposer une nouvelle forme de peinture, s’acharne à peindre une oeuvre qu’il ne parviendra jamais à terminer…et se suicide ! Cézanne prendra assez mal le destin tragique que lui prédit Zola….
Dans cette version de 1887 de la montagne Sainte-Victoire , conservée au Courtaud Institute de Londres, un grand pin dessine comme un cadre autour du paysage. Son ombre baigne le premier plan d’une agréable fraîcheur tandis qu’en arrière-plan l’aride montagne Sainte-Victoire semble écrasée par le soleil de la Provence. Le mistral agite les branches du pin qui suivent les courbes de la montagne comme une caresse. Dans un jeu d’ombre et de lumière, des maisons aux arêtes saillantes ponctuent le paysage. A droite, le viaduc du chemin de fer Aix-Marseille prolonge le paysage.
Obsédé par sa montagne, Cézanne mourra pour elle. Le 15 octobre 1906, il est surpris par l’orage alors qu’il est en train de la peindre. Il reste plusieurs heures sous la pluie, fait un malaise et c’est dans une charrette de blanchisseur qu’il est ramené chez lui. Il meurt une semaine plus tard d’une pneumonie.