La vie de Nicolas de Staël est un véritable roman. Né dans une grande famille russe, les Staël von Holstein (dont est également issue l’écrivaine Germaine de Staël), le jeune baron fuit son pays à l’âge de 3 ans, chassé par la Révolution de 1917. Très vite, alors que la famille est installée en Pologne, il perd ses parents. Il est adopté en Belgique où il étudie l’art. Il s’installe ensuite à Paris où il côtoie de nombreux artistes. Il voyage beaucoup, attiré par la lumière du Sud, aime passionnément et se suicide à l’âge de 40 ans en se jetant de la terrasse de son atelier d’Antibes.
Avant de réaliser cet immense tableau de 2 mètres de haut sur 3,5 mètres de large, Nicolas de Staël a réalisé 25 tableaux, la plupart en petit format sur le thème du football.
Fou de foot, Nicolas de Staël ? Pas du tout !
Le 26 mars 1952, il assiste même, avec son épouse, à son premier match de football, un match amical qui oppose la France et la Suède au Parc des Princes. Il connaît à peine les règles de ce sport et le match, remporté 1-0 par la Suède, n’a guère d’intérêt.
Mais ce match a une particularité : c’est le premier match en France à se jouer en nocturne, éclairé à l’électricité.
Pour Staël, c’est une révélation. Lorsqu’il rentre chez lui, il ne peut pas dormir et se met immédiatement à fixer le souvenir de cette expérience qu’il décrira avec enthousiasme à son ami le poète René Char : » Entre ciel et terre, sur l’herbe rouge ou bleue, une tonne de muscles voltige en plein oubli de soi avec toute la présence que cela requiert en toute invraisemblance. Quelle joie ! René, quelle joie ! »
Sur le tableau, de larges formes de couleur, en couches épaisses (tellement épaisss que le tableau pèse tout de même 200/ kgs), des lignes obliques qui traduisent le dynamisme des corps en mouvement. Et le noir du ciel qui rappelle que le match se jouait de nuit. Pour poser la peinture, Nicolas de Staël utilise de larges spatules et même une planche de métal pour racler la surface, créant des textures inédites et différentes pour chaque forme.
Avec cette série de tableaux, le peintre se situe entre le figuratif et l’abstraction, abandonnant peu à peu cette dernière au grand dam des peintres abstraits qui y voit une trahison.
C’est d’abord aux États-Unis que cette série connait le succès. Le galeriste new-yorkais Paul Rosenberg signe avec lui un contrat d’exclusivité en 1953.